Depuis le confinement du printemps 2020, l'idée d'un mode de vie de proximité est devenue un rêve commun. Le concept de "bureau ou ville du quart d'heure" répond à trois priorités : le défi écologique pour atteindre la neutralité carbone d'ici 2050, le défi économique pour lutter contre la pauvreté et l'impact social pour combattre l'exclusion.
Les travailleurs ont compris l'importance d'un équilibre entre vie professionnelle et personnelle qui dépend souvent du temps de trajet. Selon une enquête de 2020, 59 % des travailleurs de moins de 35 ans seraient prêts à réduire leur salaire de 5 % pour limiter leur trajet domicile-bureau à vingt minutes.
Le modèle de développement doit être polycentrique et multiservices en offrant toutes les commodités nécessaires pour répondre rapidement et efficacement aux besoins quotidiens des utilisateurs tels que travailler, se nourrir et se cultiver.
Implantation des commerces au centre des quartiers
Bien que cette idée ne soit pas nouvelle, car initiée à Portland à la fin des années 2000, elle a inspiré plusieurs villes françaises telles que Rennes et Bordeaux, ainsi que d'autres villes du monde entier comme Melbourne qui a développé le concept de "voisinage à 20 minutes" et Ottawa qui a créé le "voisinage à 15 minutes".
Cette idée est inspirée de l'Europe du Nord où la mobilité douce est traditionnellement encouragée et considérée comme une solution responsable pour l'environnement. Le réseau mondial des villes pour le climat, C40, a donc inclus ce concept dans ses grandes métropoles telles que Milan, Montréal, Bogota et Buenos Aires.
Les solutions encouragent l'adoption d'un nouveau rythme de vie qui rime avec fluidité, efficacité et bien-être au cœur d'un environnement sensiblement réduit dans sa production de gaz à effet de serre. Cette hyper proximité serait une source de profits pour les commerçants du quartier qui seront nettement plus valorisés. La cité du quart d'heure, grâce à ses qualités de cohésion sociale, réduirait favorablement les inégalités au sein des quartiers.
Le concept de territoire polycentrique implique la mise en place d'espaces de coworking, d'environnements verts, de parcs, d'activités culturelles et sportives, ainsi que de pistes cyclables et l'implantations d'entreprises. Selon la maire de Paris, Anne Hidalgo, ce projet vise à transformer la ville en un lieu de proximité offrant des services et des opportunités de collaboration.
Pour y parvenir, il est nécessaire de repenser l'organisation des espaces urbains en des lieux multiusages. Cette dernière met également en avant l'importance de placer les établissements scolaires au cœur de chaque quartier afin de stimuler l'intérêt pour les services de proximité.
Paris ville du quart d’heure : qu’est-ce que c’est ?
L'approche urbaine consiste à créer des municipalités où les habitants ont accès à tous les services et équipements nécessaires à moins de 15 minutes à pied ou à vélo de leur domicile. L'idée est de permettre aux individus de réduire leur utilisation de la voiture en offrant des espaces de vie, de travail et de loisirs à proximité les uns des autres. Cette initiative pourrait contribuer à la réduction de la pollution atmosphérique, à la diminution du temps de trajet et à une gestion améliorée du temps, tout en améliorant la qualité de vie des citadins.
Le concept de "ville du quart d'heure" a été adopté par plusieurs organisations dans la capitale de Paris, notamment la société foncière lyonnaise (SLF), qui en est un précurseur. Cette dernière met l'accent sur la création de bureaux parisiens intégrés dans un environnement résidentiel et commercial. Un grand projet de 23 000 mètres carrés, appelé BIOME, est en cours dans le 15ème arrondissement de Paris, entre la rue du Commerce et le centre commercial Beaugrenelle.
Dimitri Boulte, directeur général de SFL, affirme que le projet consiste à développer un écosystème autour d’une dynamique de 2 000 employés au sein d’un lieu central où se concertent services, commerces, parcs et restaurants a porté de main.
Les objectifs de Paris ville de la proximité
Carlos Moreno, urbaniste et professeur à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, a repensé l'idée de la ville du quart d'heure qui n'a pas été spécifiquement inspirée par la pandémie mais qui a bénéficié d'une nouvelle impulsion grâce à l'évolution du télétravail. L'urbaniste estime que ce concept peut contribuer à redynamiser les quartiers urbains.
Pour y parvenir, le projet Paris ville quart d'heure repose sur plusieurs mesures cohérentes visant à améliorer la qualité de vie des habitants en réduisant considérablement le temps de trajet, en préservant la qualité de l'air, en aménageant des espaces publics agréables et accessibles à tous et en favorisant la convivialité et la mixité sociale.
Pour atteindre ces objectifs, il est essentiel d'encourager les modes de transport actifs tels que le vélo ou la marche à pied, d'améliorer les lignes de transport en commun et de réduire l'utilisation de la voiture. Ces changements permettront également de stimuler l'économie locale en faveur des commerces de proximité et en créant des espaces de travail partagés pour soutenir des projets collaboratifs.
Le projet vise à promouvoir la durabilité environnementale en assurant la qualité et la quantité de la biodiversité urbaine et en promouvant la gestion durable des ressources tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre pour lutter contre le changement climatique.
Paris ville du quart d’heure : quels impacts pour les commerces ?
M. Moreno a affirmé que la mise en place de la ville quart d’heure aurait un impact positif sur la cohésion sociale. Toutefois, on se demande comment cela pourrait affecter les commerces et leurs activités. Il est proposé de réfléchir à une utilisation plus efficace des infrastructures déjà existantes, étant donné que les bâtiments sont en moyenne occupés seulement 30 à 40 % du temps.
En effet, une transformation de ces bâtiments pourrait favoriser la mutualisation des espaces en créant des lieux polyvalents pour de multiples activités. Un concept appelé chronotopie, où un même lieu peut servir à différentes fonctions pour offrir de nouvelles possibilités. Par exemple, “Une salle de sport de jour pourrait être transformée en discothèque de nuit. Les cafés pourraient accueillir des cours de langues le soir et les bâtiments publics pourraient accueillir des concerts le week-end.”
Cependant, la proximité peut engendrer des dilemmes. En effet, elle peut compromettre l'organisation sociale et perturber les choix individuels. Malgré cela, cette initiative pourrait avoir un impact positif sur les petits commerces locaux en augmentant leur visibilité et leur accessibilité pour les citadins. Les habitants n'auraient plus besoin de se déplacer loin de chez eux pour trouver ce dont ils ont besoin en termes d'approvisionnement, d'apprentissage, de travail, de soins de santé et de loisirs.
Il est important de noter que l'implantation de ce concept pourrait toutefois avoir des conséquences sur les commerces situés en dehors des quartiers les plus recherchés, qui pourraient faire face à une concurrence accrue.
M. Moreno souligne l'importance d'adapter l'aménagement aux conditions locales de chaque ville. Paris est une ville segmentée entre le Nord, le Sud, l'Ouest et l'Est. Par conséquent, il est judicieux de prévoir un rééquilibrage économique pour encourager la décentralisation en collaboration avec tous les acteurs concernés afin de favoriser la mixité fonctionnelle au sein de chaque lieu.
