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Interview croisée : Inflation et remontée des taux - changement de paradigme pour le marché de l’investissement ?

Arthur Loyd Etudes & Recherche et Arthur Loyd Investissement vous dévoilent le regard croisé - en exclusivité pour Business Immo - de Cevan TOROSSIAN, Directeur Arthur Loyd Études & Recherche et Thierry JUTEAU – Directeur Investissement autour d’un sujet au cœur de l’actualité : les impacts de l’inflation dans l’investissement immobilier.

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« Inflation et remontée des taux : changement de paradigme pour le marché de l’investissement ? » 

Dans une note achevée début juillet intitulée « Inflation et immobilier d’entreprise : quels impacts ? » - disponible en téléchargement en bas de page, Arthur Loyd décrypte l’actualité mouvementée du moment et livre en exclusivité ses analyses. Le retour de l’inflation à des niveaux proches du début des années 1980 et la remontée des taux des obligations d’Etat à 10 ans font ressurgir les incertitudes sur le marché de l’investissement en immobilier d’entreprise. Arthur Loyd, en exclusivité pour Business Immo vous dévoile l'entretien avec Cevan TOROSSIAN, Directeur Etudes & Recherche et Thierry JUTEAU, Directeur Investissement.

Photo Cevan Torossian

     Cevan TOROSSIAN,
     Directeur,
     Arthur Loyd Études & Recherche

Photo Thierry Juteau

Thierry JUTEAU,
Directeur Investissement,
Arthur Loyd Investissement

Dans quelles mesures l’inflation impacte-t-elle le marché de l’investissement en immobilier d’entreprise ?

Cevan Torossian : La période que nous vivons est sans précédent en tout point de vue : des tensions inflationnistes qui nous ramènent 40 ans en arrière, une guerre en Ukraine dont les répercussions géopolitiques et économiques sont inédites ou encore des reliquats du Covid- 19, avec par exemple des ruptures de chaines d’approvisionnement, qui peinent à se résorber. Ce contexte, particulièrement incertain, conjugué aux annonces de la BCE pour endiguer l’inflation, devraient changer la donne pour le marché immobilier. En effet, les rendements des obligations d’Etat, actifs considérés comme sans risque et permettant donc de calculer la prime de risque immobilière, ont connu une remontée soudaine au premier semestre 2022. L’ère des taux bas – voire négatif – semble désormais révolue. En quelques mois, le spread OAT 10 ans versus taux de rendement prime du Quartier Central des Affaires parisien a chuté pour atteindre 75 points de base fin juin 2022, niveau désormais inférieur à sa moyenne historique de 130 points de base qui assure, en théorie, l’attractivité du compartiment immobilier.

Par effet de contagion, nous nous attendons donc à un réajustement plus ou moins conséquent des taux de rendement immobiliers dans les mois à venir, et par ricochet, des valeurs vénales. C’est un changement majeur qui se profile sur le marché de l’investissement.

Thierry Juteau : Face à ce contexte de fortes incertitudes, le marché de l’investissement en immobilier d’entreprise s’adapte au quotidien, mais il est encore trop tôt pour en mesurer tous les effets. Certaines commercialisations lancées ces derniers mois sont actuellement en stand-by, faute d’offres correspondant aux attentes des vendeurs. De manière très ponctuelle, des repricing en pleine due diligence ont même eu lieu. Les acquéreurs prennent désormais en compte la remontée des taux obligataires mais surtout le durcissement des conditions de financement. En effet, les investisseurs ayant recours à la dette voient leurs conditions financières fortement impactées, de plus 100 points de base par rapport à l’année dernière, du fait de la remontée du coût de financement sur le marché inter bancaire européen. Les banques vont davantage favoriser les actifs prime localisés dans les marchés profonds, labellisés et loués à des utilisateurs en bonne santé financière. De même que les critères ESG sont maintenant scrutés par les prêteurs. Les acteurs en full equity sont de fait épargnés par cette situation et l’on peut s’attendre à ce qu’ils animent davantage le marché de l’investissement au second semestre 2022 ainsi qu’en 2023.

On assiste également, chez certains investisseurs, à des évolutions rapides dans les stratégies d’allocation. Une répartition plus équilibrée entre les différents actifs immobiliers d’une part, et/ou une allocation dédiée à l’immobilier réduite. Pour certaines typologies d’actifs immobiliers, la décompression des taux avait été amorcée bien avant, en particulier le commerce. Et si les dernières années avaient vu certains investisseurs se désintéresser de l’immobilier commercial – en réponse aux différentes crises comme les Gilets Jaunes, le Covid ou encore l’évolution des modes de consommation perturbant les cash-flows des bailleurs – il y a fort à parier pour que quelques-uns reviennent vers cette typologie plus rémunératrice sur le rendement en capital. En revanche, il faudrait veiller à ce que l’indexation des loyers soit contenue à l’instar du « bouclier loyer » pour le résidentiel, afin de préserver autant que possible les taux d’effort, et d’éviter tout bonnement la fermeture de commerces.

D’ailleurs, quid des loyers ?

Cevan Torossian : Si l’on se met du côté des bailleurs, l’inflation agit, de prime abord, positivement sur l’indexation des loyers puisque le calcul des différents indices repose en partiesur l'indice des prix à la consommation. Au 1er trimestre 2022, l’indice des loyers des activités tertiaires (ILAT) a connu une augmentation de + 5,10 %, l’indice des loyers commerciaux (ILC) de + 3,30 % et enfin près de + 7,00 % pour l’indice du coût de la construction (ICC). Ces variations positives augmentent de fait le rendement global en immobilier. Mais il convient avant tout de prendre en compte les locataires et leur capacité à endosser des hausses de loyers conséquentes. 6,8 % en 2021 qui a permis aux entreprises de reconstituer leur marge, on peut s’attendre à une dégradation de leur situation financière à court-moyen terme. Ces mêmes marges devraient très probablement être impactées par la poussée de l’inflation et un ralentissement économique généralisé. Dans cette perspective, certains utilisateurs pourraient tenter de renégocier leurs conditions financières avec leur bailleur, d’autres devront trouver des solutions plus drastiques comme une réduction de surfaces, voire un déménagement afin de limiter leurs coûts immobiliers.

Comment voyez-vous la fin d’année 2022 ?

Cevan Torossian : Il faut y voir du positif : le 1er semestre 2022 a été particulièrement dynamique, avec plus de 10 milliards d’euros investis en immobilier d’entreprise banalisé en France. Et nous tablons sur une année à près de 20 milliards d’euros correspondant à la moyenne à 20 ans en investissement. Du côté du marché locatif, la première partie d’année a été également bien orientée en Ile-de-France : + 24 % en un an côté demande placée avec un niveau quasiment égal à la moyenne décennale. Le second semestre sera probablement moins actif tant pour le locatif que pour l’investissement, en lien avec la dégradation de l’environnement macro- économique.

Des adaptations seront nécessaires et comme évoqué précédemment, les taux de rendement immobiliers devraient s’ajuster à court-moyen terme face à la remontée des taux obligataires et afin que l’immobilier conserve une rémunération convenable. Mais tout dépendra du contexte géopolitique et économique. Ainsi, même si l’exercice peut s’avérer périlleux, notre scénario dit « central » est celui d’un retour du taux prime bureaux de Paris QCA à 3,00% d’ici la fin 2022, soit une décompression de l’ordre de 30 points de base par rapport à son niveau actuel. Notre scénario « défavorable », quant à lui, table sur une hausse plus sensible de 80 points de base dont les conséquences sur les valeurs d’expertise seraient assez lourdes. Bien évidemment, nos hypothèses concernent une classe d’actifs – le bureau – et la décompression des taux sera différente en fonction de la qualité de l’immeuble, de sa localisation et de sa valorisation au regard notamment des nouvelles normes environnementales que le Décret Tertiaire va rendre obligatoire progressivement.

Thierry Juteau : Plusieurs facteurs nous permettent aujourd’hui d’entrevoir une fin d’année et un début 2023 plus optimiste. Les marchés locatifs centraux, notamment de Paris et de La Défense (qui affiche une hausse de + 15 % en un an de sa demande placée), restent vigoureux grâce à des utilisateurs en quête de centralité et d’efficience, ce qui devrait alimenter le pipe de produits sécurisés. Par ailleurs, l’abondance d’equity disponible et la valeur refuge de l’immobilier en période inflationniste sont de nature à conforter le marché de l’investissement. Enfin, la chute de la monnaie unique et un retour à la parité euro/dollar (au 18/07/2022 1,00 euro équivaut à 1,01 dollar) pourrait, si cette situation perdure, favoriser les investisseurs nord- américains sur nos marchés nationaux, à l’instar de la fin des années 1990 où ces derniers avaient investis massivement dans l’hexagone.

Nous assistons probablement à la fin d’un cycle immobilier, une période qui sera sans doute propice aux opportunités pour les investisseurs en mesure d’adapter leur grille de lecture face à ce nouveau contexte. Mais nous n’avons aucun doute sur la résilience du marché français de l’investissement.

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