Investissements records dans les filières de transition climatique en 2023, avec un risque de ralentissement lié à des facteurs politiques, économiques et sociaux. Malgré une croissance continue des investissements, des incertitudes pourraient freiner la dynamique.
lire l'articleVers un record absolu en 2023
Les montants investis dans les filières de transition climatique continuent de croître, atteignant même un niveau record, avec 12,8 milliards d’euros engagés au premier semestre 2023, soit une hausse de 43 % par rapport à la première partie d’année 2022. Au total, ce sont 22 à 24 milliards d’euros qui devraient être injectés dans les filières de transition climatique sur l’ensemble de l’année 2023, ce qui constituerait une performance sans précédent. Soit une conséquence des efforts pour donner corps à la décarbonation de l’économie française.
En dépit de ces chiffres flatteurs, les signes de ralentissement ne sont-ils pas d’ores et déjà là ? Pour ce qui est du législateur - longtemps moteur dans la transition écologique - le risque de bouleversements politiques, notamment dans la perspective des élections européennes prochaines, pourrait inciter à une grande prudence sur la mise en place de nouvelles contraintes. Un changement de positionnement que tend à illustrer le récent rejet, par le Parlement européen, du règlement européen sur les pesticides¹. D’un autre côté le durcissement législatif sur certains sujets, notamment l’accès au foncier par le biais de la loi ZAN, n’est pas pour faciliter la mise en place de nouveaux projets industriels, souvent grands consommateurs de foncier.
Du côté des acteurs privés, les filières vertes pourraient pâtir d’un accès plus restreint – et plus coûteux – au crédit, conséquence de mois de lutte sans merci des Banques Centrales contre l’inflation. Toujours pénalisés par un coût de la vie élevé, et dans un contexte d’inversion de la courbe du chômage, les consommateurs finaux ont-ils enfin les moyens de passer à un mode de consommation durable, certes essentiel ? Autant d’incertitudes qui pourraient peser sur les décisions d’acteurs économiques tentés par une position attentiste.
Source : Baromètre Arthur Loyd, d’après données Trendeo
* : Estimation des montants investis en 2023 au regard d’un 2ème semestre 2023 qui serait compris entre 10 et 12 milliards d’euros
1 : D’après Le Monde « Pour la première fois, toute l’Union Européenne a enclenché la marche arrière sur l’environnement », chronique de Stéphane Foucart, le 26 novembre 2023
Les opérations supérieures à 500 millions d’euros à un niveau record
Si les montants investis dans les filières de transition climatique atteignent un niveau record au premier semestre 2023, le nombre de projets lancés décroît quant à lui légèrement par rapport au premier semestre 2022, passant de 192 à 181 opérations confirmées. Une évolution baissière qui tendrait à illustrer que la dégradation du contexte macroéconomique n’est pas sans effet sur les investissements dans les filières vertes.
Les opérations de petit volume sont plus particulièrement orientées à la baisse. Seuls 101 nouveaux projets inférieurs à 10 millions d’euros ont ainsi été confirmés en première partie d’année 2023, un chiffre en deçà des 111 programmes initiés au premier semestre 2022, et bien inférieur au niveau de la première partie d’année 2021, durant laquelle pas moins de 168 projets avaient été confirmés.
En termes de montants, c’est néanmoins le créneau des projets de grand volume, portant sur des investissements allant de 100 à 500 millions d’euros, qui connaît le plus net recul au premier semestre 2023. Seuls 6 projets ont ainsi vu le jour durant cette période, ne totalisant que 1,2 milliard d’euros, un chiffre inférieur de 59 % à la performance du premier semestre 2022, durant lequel 11 projets s’étaient concrétisés, pour un total de 3 milliards d’euros.
Les filières vertes auront plus spécifiquement été soutenues, au premier semestre 2023, par les opérations de très grand volume, surpassant 500 millions d’euros. Seuls 4 projets, réalisés à l’initiative de Prologium Innovation, Carbon, Holosis, XTC New Energy Materials et Orano, ont ainsi représenté à eux seuls un budget global de 8,9 milliards d’euros. Pour la première fois, les engagements XXL s’avèrent ainsi largement majoritaires, représentant plus des deux tiers du volume total investi. Une illustration de l’ampleur des investissements à mener pour faire aboutir la transition écologique.
Source : Baromètre Arthur Loyd, d’après données Trendeo
Source : Baromètre Arthur Loyd, d’après données Trendeo
Activité très soutenue pour les EnR, les batteries et la filière recyclage et déchets
La répartition des investissements, en nombre de projets, dans les filières vertes n’évolue que marginalement au premier semestre 2023. Si les projets dans les EnR demeurent majoritaires, représentant 34 % du nombre total d’investissements, le secteur du recyclage & des déchets est le seul à bénéficier d’une dynamique positive au premier semestre 2023. Les segments de l’Agritech et du bio, du bâtiment durable et des éco matériaux, déjà minoritaires, connaissent tous deux des retraits au premier semestre 2023, reflets des difficultés économiques que connaissent actuellement ces secteurs.
Conséquence des investissements massifs de Prologium, XTX New Energy Materials et Orano à Dunkerque, le secteur de la batterie et du véhicule électrique connaît une croissance record au premier semestre 2023, avec 7,2 milliards d’euros investis, soit plus de 3 fois le budget alloué à ce segment en 2022. Cela même si les montants engagés dans le véhicule électrique diminuent quant à eux nettement, après un premier semestre 2022 plus spécifiquement animé par les investissements de ArcelorMittal sur son site de Grande-Synthe.
Les montants investis dans le secteur des EnR atteignent quant à eux 3,8 milliards d’euros, stimulés par une nette progression des engagements dans le solaire et, dans une moindre mesure, l’éolien, la géothermie et la récupération de chaleur. C’est néanmoins bien plus spécifiquement au segment du photovoltaïque que le gouvernement français entend donner la part belle, comme l’illustre sa nouvelle « Stratégie Française pour l’Energie et le Climat »¹, rendue officielle le 22 novembre 2023. Une ambition qui passe par le « doublement prévu du rythme annuel du développement de nouvelles capacités pour atteindre plus de 75 GW en 2035 »*.
1 : Ministère de la Transition écologique, « Stratégie française pour l’énergie et le climat », novembre 2023
Source : Baromètre Arthur Loyd, d’après données Trendeo
Source : Baromètre Arthur Loyd, d’après données Trendeo
Plus de 7 milliards d’euros investis en Hauts-de-France
Hors montants non répartis Source : Baromètre Arthur Loyd, d’après données Trendeo
L’ensemble des régions françaises, Corse et Drom-Com exceptés, bénéficie d’investissements dans les filières liées à la transition climatique au premier semestre 2023. Ce dernier a plus spécifiquement été marqué par une prédominance des Hauts-de-France qui, avec 7,2 milliards d’euros engagés, ont ainsi concentré 59 % du volume total investi. Ce dynamisme s’explique principalement par l’officialisation de l’implantation des usines de batterie de Prologium Technology, XTC New Energy Materials et Orano à Dunkerque, mais également 14 projets de plus petit volume (hydrogène, batterie, traitement des déchets et véhicule électrique…).
La région Provence-Alpes-Côte d’Azur et le Grand-Est, où les projets d’investissement progressent fortement, ne sont pas en reste. Ils se tournent tous deux résolument vers les énergies photovoltaïques, fortement consommatrices en capitaux. A Fos-sur-Mer et Sarreguemines, Carbon et Holosis ont ainsi prévu de concrétiser des investissements de plusieurs centaines de millions d’euros. 131 projets d’investissement ont également été programmés dans les autres régions de France, représentant un volume total de 2,2 milliards d’euros, soit 18 % du montant total engagé.
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